Gérard Bloch

Gérard BLOCH (1920-1987)
Étudiant en mathématiques, Gérard Bloch rejoint à 18 ans les rangs de la IVe Internationale l'année de sa proclamation (1938). Pendant la guerre, il milite dans les Comités français pour la IVe Internationale dans la zone sud. Arrêté à Lyon par la police française en août 1941, inculpé « d’activité communiste » et d’ « atteinte à la sûreté extérieure de l’État », il est condamné à douze ans de travaux forcés. En juin 1944 il est déporté dans le camp de concentration de Dachau.
À son retour de déportation en mai 1945, il adhère au Parti communiste internationaliste section française de la IVe Internationale (PCI-SFQI), né en 1944 de la fusion des différents groupes trotskystes. Reçu à l’agrégation de mathématiques, il enseigne à Clermont-Ferrand. Élu au comité central du PCI au congrès de 1946 il se présente à Clermont-Ferrand comme tête de liste du PCI aux élections législatives. Il affronte une violente campagne de calomnie du PCF. L'hebdomadaire local du PCF La Voix du peuple qualifie Bloch d’« hitlérien », de « mouchard », d’« hitléro-trotskyste » et  le PCI de  « groupement d’hitlériens qui veut excuser les barbares nazis. » Il salit le travail des trotskystes de fraternisation révolutionnaire avec les ouvriers allemands sous l'uniforme pendant la guerre... quand le parti stalinien lançait le mot d'ordre « à chacun son boche
Le PCI et son journal La Vérité, dont Bloch est l’un des collaborateurs les plus réguliers, mènent campagne contre la guerre en Algérie (1954-1962). En décembre 1956, Gérard Bloch et trois autres dirigeant du PCI (Daniel Renard, alors directeur de La Vérité, Pierre Lambert et Stéphane Just) sont traduits devant la 19e chambre correctionnelle de Paris pour « atteinte à la sécurité de l’État. »
De 1958 à 1964, Gérard Bloch dirige La Vérité. Il y publie de nombreux articles sous les pseudonymes de Varenne, Octave Boisgontier, Michel Chardin et Monge.
À partir des années 1960, chargé de la formation théorique des nouveaux militants, il anime de nombreuses conférences dans le cadre des Cercles d’études marxistes organisés par l’Organisation communiste internationaliste (OCI) et son organisation de jeunesse, l’Alliance des jeunes pour le socialisme (AJS). Ces conférences portent sur les problèmes internationaux, le marxisme, le militantisme, la science, la culture...
C'est une partie des articles parus dans La Vérité et des conférences qui sont rassemblé(e)s dans ce dossier.

 

Lettres de Laurent et Marie-Hélène Schwartz à Gérard et Lucienne Bloch (1941-1960)

« Gérard Bloch était lycéen lorsque je le connus en 1936. Sa mère était une proche de la famille de Marie-Hélène et avait été son professeur de piano. C’est durant l’été 1936 à la montagne que, me voyant lire du Trotsky, il soupçonna que nous étions du même bord. Notre relation se développa rapidement à partir de ce moment -là. Très intelligent, il excellait aussi en mathématiques. Après son premier prix au concours général, on s’attendait à le voir devenir mathématicien, mais il préféra sacrifier ses ambitions scientifiques à la politique...Pendant l’Occupation, il fut déporté et survécut. Jusqu’à sa mort il y a quelques années, il demeura trotskiste et membre du PCI. Jamais il ne me pardonna d’avoir rompu avec le trotskisme. En me fixant dans les yeux, il me disait : Quand je me regarde dans la glace, je ne vois pas la face d’un traître. Cette langue de bois caractéristique de l’extrême gauche de tous les temps ne parvint pas à m’ôter la solide affection que je lui portais. »

Laurent Schwartz, Un mathématicien aux prises avec le siècle,
Éditions Odile Jacob, 1997, p. 115.


Ces derniers mots résument à eux seuls la teneur des lettres de Laurent Schwartz à Gérard Bloch. Elles traversent la guerre, l’Occupation, la Libération, l’après-guerre jusqu’en 1960.
Dans la clandestinité, (il l’était au double titre de juif et de trotskiste), Laurent Schwartz assure une solidarité active auprès de Gérard emprisonné en 1942, envoyant lettres, colis de nourriture, livres etc.
Des lettres « mathématiques », pour certaines, où les spécialistes trouveront les idées des éléments mathématiques du groupe Nicolas Bourbaki.
Et puis la libération, le retour et le deuil des camarades déportés, le combat politique, l’enthousiasme devant les résultats électoraux du PCI...
Enfin, il faut souligner la préoccupation et l’attention constante de Laurent Schwartz (comme un grand frère) autour de Gérard, les conseils pour la reprise des études et l’acquisition des diplômes, l’aide matérielle, les interventions auprès de ses relations scientifiques...
Une correspondance traversée par l’amitié et le militantisme.

Anne-Édith Bloch